B. Les RP : pour tous et en tout temps ?

En communication, de nombreuses spécialités existent, comme la communication interne, communication institutionnelle ou la communication évènementielle. Est-ce que toutes ces spécialités impliquent le développement d’une stratégie de relations publics ? Ou est-ce que les RP sont réservées uniquement à certaines formes de communication ?

Les RP, c’est du sérieux !

Comme nous l’avons vu dans la première partie de ce cours, le développement des relations publics implique… Un public ! Selon le type de public visé, la stratégie RP changera, mais elle conservera toujours le même objectif : développer et conserver des relations de confiance, saines et durables. 

Le premier type de communication qui nous vient naturellement à l’esprit lorsque l’on pense relations publics est la communication institutionnelle ou corporate.

Elle se définit comme : 

“L’ensemble des actions de communication qui visent à promouvoir l’image d’une institution, d’une entreprise ou d’une organisation vis-à-vis de ses administrés, clients et différents partenaires.

La communication institutionnelle d’entreprise se distingue classiquement de la communication de marque dans la mesure où c’est l’organisation qui est promue et non directement ses produits ou services.” (B.Bathelot, 2017)

 

On reconnait bien dans cette définition les caractéristiques constituantes des relations publics. La communication corporate est essentielle pour toute organisation, car elle permet de partager sa vision du monde, ses ambitions, ses valeurs et son histoire. Elle s’adresse autant aux consommateurs, qu’aux collaborateurs et futurs collaborateurs, ou encore aux administrés. 

Il est essentiel de se souvenir qu’une bonne communication corporate est une communication centrée autour de l’histoire et des valeurs. Ce n’est pas une communication marketing ou commerciale. 

Par exemple, Intermarché rappelle régulièrement ses valeurs : la famille, les amis, le partage et le mieux-manger à travers de splendides communications corporates : 

On ne sait pas vous, mais nous, on est fan ! 

Le deuxième type de communication où les relations publics jouent un rôle essentiel est la communication financière, définie comme : 

“l’ensemble des actions de communication réalisées par des entreprises ou organismes de placement et ayant trait à leur activité et résultats économiques et financiers.

Les cibles ou destinataires de la communication financière sont généralement :

– les partenaires économiques

– les actionnaires actuels ou potentiels

– les décideurs économiques

– les analystes

– les gestionnaires de fonds

– la presse spécialisée

– plus rarement le grand public”(B.Bathelot, 2017)

Ces informations représentent un élément primordial pour les entreprises cotées en bourse, car ce sont elles qui vont faire fluctuer, à la hausse comme à la baisse, le cours des actions. En effet, une mauvaise gestion de la communication financière entrainerait de facto une perte de confiance de la part des investisseurs ou des analystes, des publics couvrant l’une des fonctions vitales de l’entreprise : le financement.

Des relations tout public ?

Lorsque l’on parle de relations publics et d’influence, on pense presque automatiquement au lobbying et à la communication avec les pouvoirs publics. 

Le lobbying se définit comme : 

“l’action de protection par des groupes de pression, les lobbies, des intérêts particuliers de telle ou telle organisation face aux décisions des pouvoirs publics.

L’expression, qui vient du mot anglais lobby, fait référence au hall de l’hôtel Willard, à Washington, où des représentants de groupes d’intérêt, pensant y trouver le général Grant devenu président des États-Unis après la guerre de Sécession, venaient le guetter pour plaider leur cause.” (Aim, Billiet, 2020)

Il peut passer par la rédaction de documents pour mieux faire comprendre le point de vue des organisations ou d’un secteur, mais surtout par la rencontre entre les lobbyistes et leurs interlocuteurs : les décideurs publics. 

En France, de nombreux débats entourent la pratique du lobbying. Est-elle suffisamment encadrée ? Est-ce que tous les lobbies peuvent exister ? 

Certains vous répondront que l’acte de convaincre et d’influencer les décisions législatives est le plus vieux métier du monde. Ce serait l’essence même de la démocratie que de permettre à chaque groupement d’opinion de s’exprimer librement pour défendre ses intérêts.

Mais ce qui peut inquiéter avec le lobbying, c’est son manque de transparence. Il a fallu attendre 2019 pour que 320 députés de la majorité présidentielle s’engagent enfin à respecter la transparence dans leurs agendas en indiquant clairement leurs rencontres avec des lobbyistes et les sources des amendements parlementaires (Le Monde, 2019). 

Mais est-ce que ces mesures sont suffisantes pour garantir la poursuite de l’intérêt général et prévenir de la corruption ? 

Si ce sujet fait autant parler de lui, c’est parce qu’aujourd’hui les citoyens ont tous accès à l’information sur le web et les réseaux sociaux et souhaitent s’engager activement dans le débat public. C’est pourquoi il est plus important que jamais d’imaginer une stratégie de relations publics authentique et transparente. 

Le cas particulier de la communication de crise

Quand on parle de communication de crise, on s’imagine tout de suite un bureau qui se réunit en plein milieu de la nuit pour répondre en moins de 6 heures à un scandale inattendu. Il existe et c’est ce qu’on appelle une “cellule grise”. Mais la communication de crise, c’est avant tout un travail de prévention pour permettre d’éviter ces épisodes chaotiques aux conséquences souvent désastreuses pour la réputation et le développement économique des entreprises. 

Afin de mieux comprendre ce qu’est une crise, nous allons nous attarder sur un évènement vécu par H&M en 2018. 

H&M est une marque bien connue de tous originaire de Suède. En 2018 l’acteur phare de la fast fashion est alors présent dans plus de 69 pays et affiche en 2017 un chiffre d’affaires de 231 milliards de couronnes suédoises. On peut donc penser que la communication d’un tel mastodonte est gérée d’une main de maitre. Mais aucune entreprise n’est malheureusement à l’abri de certains ratés. 

 

“Coolest monkey in the universe”

L’image qui ne passe pas

 

  • Contexte : cette photo visible sur le site du retailer a très rapidement été partagée sur les réseaux sociaux, où les utilisateurs du monde entier se sont offusqués du caractère raciste de cette représentation. En effet, comparer les hommes noirs aux singes pour les rabaisser remonte au 16ᵉ siècle en Europe et aux États-Unis durant la période de l’esclavagisme. Les blancs voyaient alors les noirs comme des sous-humains, violents et bestiaux, qui étaient dangereux et qui violaient les femmes blanches.

    En conséquence, de nombreuses personnes ont pris la parole pour appeler au boycott d’H&M, comme The Weeknd, qui tweeta qu’il ne travaillerait plus avec la marque, alors qu’il apparaissait dans leurs campagnes publicitaires depuis 2017.  
  • Réaction de la marque : H&M réagit plus de 48h après la polémique, en s’excusant pour avoir offensé le public, mais pas pour avoir posté l’image. Une nouvelle maladresse. De plus, la marque continuait de commercialiser le sweatshirt et d’en réaliser la promotion.

    Cela entraina naturellement les médias et le public à critiquer ces excuses, qu’ils jugèrent insuffisantes et fausses. H&M dû renouveler plus platement ses excuses sur son site web et nommer 2 mois après les faits une directrice de la diversité, Annie Wu, afin de calmer les esprits.  De nouvelles mesures furent prises pour que la situation ne se reproduise plus :  

    • Création d’un système de contrôle des photos à publier par un comité de 12 personnes  
    • Création d’un système de contrôle des vêtements à chaque étape de création, afin d’identifier de façon préventive les potentielles atteintes aux sensibilités de tous  
    • Passage du nombre de personnes contrôlant les publications avant diffusion de 1 à 5 
    • Promesse d’une égalité des chances à l’accès aux postes de direction pour l’intégralité des employés 
  • Conséquences : Une crise entraine des conséquences, plus ou moins graves, selon sa gestion et son ampleur. Pour H&M, elles furent à la hauteur de la faute : 
    • Destruction de certains points de ventes sud-africains par des manifestants  
    • Fermeture temporaire de plusieurs points de ventes afin d’éviter des destructions supplémentaires  
    • Des bénéfices en baisse de 62 % entre décembre 2017 et février 2018, entrainant une baisse de la cotation boursière de l’entreprise, la ramenant à son plus bas niveau depuis 2005

Cet exemple coche toutes les caractéristiques d’une crise : 

  • Un évènement inattendu
  • L’attention publique et médiatique portée sur l’entreprise à un niveau critique
  • Atteinte à la réputation et à la pérennité financière de l’entreprise 

Malgré tout, cette crise aurait pu être évitée en prenant des mesures préventives, comme celles prises a posteriori par l’entreprise. La meilleure stratégie pour gérer une crise reste encore de mettre en place une véritable politique de prévention des risques. Il est recommandé de prévoir une organisation spécifique à la gestion de crises en respectant ces 3 étapes : 

  1. Avant la crise :  
    • Recenser les risques  
    • Recenser les publics clés pour vous aider dans la gestion de crise  
    • Création d’une procédure de gestion de la communication en cas de crise  
    • Préparation d’un ou plusieurs portes-paroles  
    • Préparation de contenus pouvant répondre aux risques de crises identifiés en amont (posts social média ; articles de blog ; communiqués de presse etc)  
    • Création d’une base documentaire recensant toute l’information utile permettant de répondre le plus rapidement possible aux accusations publiques 
  2. Pendant la crise : 
    • Prendre la parole le plus rapidement possible afin d’éviter toute interprétation 
    • Être empathique et transparent 
    • Prendre possession du territoire médiatique en vous aidant de vos publics clés et de vos portes-paroles préparés en amont  
  3. Après la crise :  
    • Faire le point sur l’expérience afin de corriger les lacunes et d’éviter qu’une crise similaire ne se reproduise 

En suivant ces principes, plus aucune crise ne vous fera peur ! 

Vous êtes curieux ? Faites des recherches sur le groupe Orpéa, vous découvrirez une crise de relations publics très intéressante. Si vous deviez travailler pour ce groupe, quelles actions proposeriez-vous pour les aider à sortir de cette situation ?