A. C’est la crise, oui, mais quelle crise ?

Les cinq grands types de crises : leurs effets exogènes et endogènes

1) FONCTIONNELLE

  • Exogène : la crise provient des fournisseurs/partenaires, du secteur d’activité de l’entreprise. Ex : le rappel de produits alimentaires à risques distribués par les GMS.
  • Endogène : la crise provient soit d’un mécontentement par rapport à un produit ou du fonctionnement de l’entreprise. Ex : l’utilisation d’huile de palme par KitKat ou le licenciement (médiatisé) d’un collaborateur (Canal +

2) ACCIDENTELLE

  • Exogène : la crise provient d’un élément extérieur. Ex : l’éruption d’un volcan islandais avait paralysé la quasi-totalité des vols passagers sur l’Europe et les USA.
  • Endogène : la crise provient d’un incident survenu en interne. Ex : une erreur de navigation provoque une collision entre deux bateaux de croisière dans un port et contraint les navires à rester à quais.

3) TECHNIQUES

  • Exogène : la crise provient d’un dysfonctionnement suite à une attaque extérieure. Ex : phishing, smishing ou vishing…ou cyber attaque.
  • Endogène : la crise provient d’un dysfonctionnement en interne. Ex : la paralysie pendant plusieurs heures d’un service de e-commerce suite à un grave incident technique de leur centre data.

4) JURIDIQUE

  • Exogène : la crise provient d’une plainte en justice que la marque subit. Ex : l’affaire Carlos Ghosn pour Renault-Nissan.
  • Endogène : la crise provient d’une action en justice lancée par la marque elle-même. Ex : attaques pour plagiat de produits.

5) COMMUNICATIONNELLE

  • Exogène : la crise provient d’une attaque que la marque subit. Ex : l’affaire de la blackface du Slip français.
  • Endogène : la crise provient d’une communication organisée par les services de l’entreprise. Ex : le crash magistral de Dolce & Gabbana en Chine.
  • Alors attention toutefois, cette typologie en cinq points, se vérifie souvent. Malgré tout, il arrive parfois qu’elles se percutent. En terme de probabilité, une crise accidentelle a toutes « les chances » de se décliner sur plusieurs tableaux. Un exemple ? En octobre 2019, la catastrophe industrielle (chimique) de Lubrizol, à Rouen, s’est déclinée en plusieurs étapes :
  • L’explosion, l’incendie et la propagation de gaz toxiques (crise accidentelle et crise technique).
  • La nécessité des pouvoirs publics à mettre en place un protocole de sécurité pour protéger la population (crise fonctionnelle et crise communicationnelle).
  • L’effet médiatique à double tranchant : sur les médias traditionnels et sur les réseaux sociaux (crise communicationnelle).
  • Les dépôts de plaintes d’associations de riverains (crise juridique).
  • Sur ce chacun de ces points, la temporalité n’est pas la même. Pour les 1, 2 et 3, nous sommes à chaud. Pour le 4, la crise juridique, c’est une autre affaire. La justice demande du temps, des enquêtes…et ses effets se font toujours sentir plusieurs années après l’éruption de la crise.
Mais à qui revient la palme des plus grosses erreurs ? A la Com’ et au marketing !

Mais où la Communication et le marketing pêchent-ils donc ?

  • Chaque action et solution de communication et/ou de marketing porte systématiquement en elle une part de remède et une autre de poison. C’est la pierre angulaire d’une bonne compréhension de la communication en crise. C’est la théorie du pharmakon ou du pharmakos de Platon : elle n’a pas pris une ride depuis plus de 2.000 ans. Elle s’applique à 100 % dans l’univers du digital…
  • Vidéo : J’ai évoqué tout à l’heure la nécessité de mener plusieurs actions, toujours dans l’idée de prévention. Parmi elles, il y a deux étapes essentielles, la cartographie et la veille informationnelle à mener aussi bien sur le Web que sur les réseaux sociaux.

Je vais prendre un exemple tout simple : la galette. Vous savez, cette spécialité bretonne que l’on sert garnie d’œuf, de jambon, de fromage ou d’autres aliments, c’est au choix.

De quoi est composé une galette ? D’eau et de farine de sarrasin, en clair, de farine de blé noir. Bête comme choux, non ?

Imaginons donc que vous êtes chargé(e) par votre entreprise, spécialisée en galette de sarrasin, de promouvoir ses nouvelles galettes. Jusqu’à présent, c’est simple, non ?

Votre mission, produire et partager des contenus sur l’attachement territorial de votre entreprise, ses valeurs bretonnes, d’entreprise, son image made in Breizh et ses nouvelles supers galettes fraîches vendues chez X, Y et Z au rayon frais.

Bon, vous allez me dire, dans cette solution de com et de marketing, c’est facile, il n’y a que des remèdes : c’est local, c’est frais, c’est contrôlé, en terme de QSE, c’est en béton, c’est produit par une entreprise aux valeurs régionales, implantée sur le territoire…ça roule, avec des contenus réfléchis, sympas, une bonne storytelling, je vais m’amuser sur les réseaux sociaux : Instagram, Facebook…Facile !

Et le poison alors ? Comment ça il n’y en a pas ? Vous avez bien réfléchi, sûr ? Vous avez pointé tous les scénarios de risques possibles et inimaginables ? Sûr, vraiment sûr ? Vos visuels alléchants sont prêts, vos textes bien sentis, vos # sont prêts à être dégainés ?

Stop, au fait, savez-vous où est cultivée la farine de sarrasin ? En Bretagne, off course ! Mais pas en quantité nécessaire pour satisfaire toutes les entreprises d’agro-alimentaire de transformation de produits secs comme la vôtre. Et d’où elle vient en majorité la farine de sarrasin ? Eh bien de Chine.

Et en plus à des tarifs de 200 à 300 € la tonne contre 600 à 1.000 € la tonne pour la farine fabriquée en Bretagne ou en France.

Alors, du coup, êtes-vous certain(e) que celle utilisée par votre entreprise ne vient pas de Chine ? Si oui, vous trouverez toujours un petit malin pour balancer l’info sur Twitter, Facebook ou ailleurs. Ça ne sera pas un tsunami, mais ça sera toujours gênant. Et les réponses aux potentielles attaques seront relativement simples. A condition de les anticiper, bien sûr !

Bon, d’accord, je cherche la petite bête, le petit truc improbable. Mais sachez aussi, et ça, c’est tellement vrai, que le diable se cache toujours dans les détails.

Et puis, pour rebondir plus largement. Depuis la loi Rse (résolutions sociales et environnementales), les entreprises se sont engouffrées dans le brand content. Valoriser son image sur les sites web, la véhiculer sur les réseaux sociaux, devenir son propre média…Laver plus vert que vert avec du green watching, attirer, séduire, marque employeur à la clé…Si tout ce qui est communiqué, marketé, est clair, vérifié, c’est bien. Si ce n’est pas clair… Attention aux dégâts !

Mais la plupart des entreprises qui se font piéger sur les réseaux sociaux ont, sans mauvais jeu de mots, tissé la propre toile dans laquelle elles se font prendre. L’exemple de la farine de sarrasin est drôle, presque indolore. Mais il n’est pas sans saveur. Aujourd’hui, et vous le savez, sur les réseaux sociaux, sur le Net, rien ne se perd, rien ne s’oublie, tout s’exhume, les infos croustillantes reviennent en effet boomerang et tout se partage à la vitesse d’un clic avec des posts assassins dans un esprit de « putaclic ». Les réseaux sociaux, je les appelle pour ma part les 3 F comme Fabuleux (parfois), Futiles (souvent) et Fatales.

Et puis, tenez, en illustration ce tout petit texte qui résume bien la situation :  il illustre bien le côté obscur du Net, non ? Pour la petite histoire, il a été écrit par Albert Camus il y près de soixante ans.

Les éléments essentiels à anticiper